Il y a maintenant 10 ans que j’exerce mon métier d’investisseur en fonds propres dans des opérations de promotion immobilière. Dans ce cadre, j’ai rencontré sans doute près de 150 promoteurs, la plupart indépendants et locaux, et j’ai investi aux côtés de la moitié d’entre eux environ. Un échantillon déjà significatif. Il est clair que la qualité du contact avec mes interlocuteurs est très souvent le facteur décisif pour décider d’aller de l’avant ou non dans une collaboration financière. Au-delà de sa personnalité, j’attache une grande importance à la manière dont le promoteur comprend son métier et, à partir de là, l’exerce. En effet, le métier de promoteur est un métier complexe et à géométrie très variable. Il recouvre une multitude de facettes et fait appel à des compétences et des qualités variées, pour ne pas dire contradictoires. La plus ou moins grande réussite du promoteur vient souvent de sa capacité à les marier.

Dans un ordre d’importance décroissant, quelles sont, selon moi, ces compétences ?

Le promoteur est un homme ou une femme de projet. Il doit l’être quand, à partir d’un terrain vague ou d’une friche foncière, il va imaginer construire tel actif immobilier. Mais il se distingue du pur créatif, dans la mesure où sa réflexion doit porter sur tous les éléments qui feront la réussite du projet (marketing-mix, faisabilité administrative et constructive, équilibre économique et financier), et non seulement sur son enveloppe externe. Le promoteur ne peut pas être seulement architecte.

Le promoteur est un chef de projet quand il doit conduire, dans un même projet, une équipe dont les membres peuvent avoir des intérêts divergents. Son projet est de construire un actif immobilier dans les meilleures conditions économiques (coût, qualité, délai) tout en intégrant en permanence un jeu de contraintes multiples et évolutives entre lesquelles il doit savoir choisir et arbitrer.

Le promoteur doit cultiver un vaste réseau, avec lequel il doit bâtir des relations fondées sur la confiance : les relations qui vont lui permettre de connaître les opportunités foncières, de gagner la confiance des propriétaires fonciers, puis celle des services d’urbanisme et des élus; les relations qui vont servir son image et sa notoriété auprès de ses futurs clients; les relations avec la myriade de prestataires techniques et de contractants ou sous-traitants et qui conditionnent la bonne exécution du chantier; les relations avec les pourvoyeurs de capitaux, là aussi fondées sur la confiance.

Par construction, le promoteur ne peut pas maîtriser toutes les compétences professionnelles que, de toute façon, il peut aller chercher auprès de ses prestataires. En revanche, il doit être un bon généraliste dans toutes ces compétences, et, bien souvent, il en maîtrise une plus que les autres (développement, construction, vente, gestion et finance). Avant de choisir ce métier à 35 ou 40 ans, les promoteurs que j’ai rencontrés avaient suivi, en général, des cursus professionnels bien identifiés : dans des groupes de promotion (fonctions de développement, responsable de programme, directeur d’agence), dans des entreprises du bâtiment (directeur de chantier ou d’agence) ou au sein d’agences immobilières (transaction).

Enfin, le promoteur doit avoir une bonne fibre financière. Sans cette fibre financière, il aura du mal à monter un dossier de financement qui porte souvent sur plusieurs millions d’euros de capitaux propres, de crédit bancaire et de garantie. Depuis la crise immobilière des années 92-95, les banques n’ont cessé de durcir leurs conditions d’analyse des projets de promotion immobilière, ce qui, au demeurant, a contribué à l’assainissement des pratiques de la profession : aujourd’hui, pour être « bancables », un promoteur et son projet doivent répondre à une batterie de critères objectifs.

Au final, dans un environnement qui s’est considérablement complexifié depuis 20 ans, le promoteur est devenu un véritable professionnel. Mais il reste avant tout un véritable entrepreneur.